Ramener l’écoute à fleur d’oreille
A fleur de peau vibratile
A fleur de peau tympanesque
Juste à portée d’oreilles
Et de l’oreille juste
Dans une certaine radicalité
Celle du pur geste écoutant
Dans une radicalité certaine
Se détourner de l’artifice
Éviter l’artificiel
L’écoute à nue n’est pas si évidente
Elle manque de spectaculaire
D’auricularité sensationnelle
D’audio-grandiloquence
D’effets très phono-spéciaux
De tape à l’œil – tape à l’oreille
La radicalité du geste dépouillé
Qui nous met à nu écoutant
Seuls devant et dans les sons
Qui souvent nous dépassent
Souvent nous submergent
Alors en immersion modeste
Nous remettre à notre juste niveau
Juste celui d’écoutant
Jouir du presque rien
Et savourer le cadeau
Qui s’offre à nos oreilles
Sans contrepartie aucune
Sans s’arroger le droit
De polluer l’espace – son
D’imposer nos bruitances
Alors marcher en silence
Ouïr en silence
Jouir en silence
De ce qui nous est offert
Des sons de la forêt, de la ville, et au-delà
Tintamarres fracassants et frémissements tout juste audibles
Ralentir et épurer
Gratter le super flux
Suivre à l’oreille le cours des choses
Revenir à l’essence
D’une écoute.basique
Incarnée sans détour
Accepter la non maîtrise
Composer avec l’improviste
Ce qui du paysage sonore surgit
Ce qui fait paysage bruissant
Ce qui rend l’entendement fragile
A n’en savoir qu’ouïr
La radicalité s’entend
Comme une simplicité
Comme une complicité
Qui n’a pas ou peu de barrières
Entre oreilles et sons
Sans l’once d’une techno-médiation
D’une électro-amplification
La radicalité est aussi dans le silence
Celui des écoutants, celui des marcheurs
Celui qui laisse entendre l’entendable
Entendre l’audible ouïssible
Dans la pure radicalité d’un geste dit sonnant.
NB : Ce texte un brin radical n’exclut pas, ne condamne pas, d’autres pratiques « techno-augmentées ». Il affiche un parti-pris intrinsèquement subjectif. S’il plaide ici pour une approche éco-minimaliste, limite manichéenne, il laisse néanmoins la porte et les oreilles ouvertes à tout ce qui peut s’entendre comme une invitation à l’écoute. Dans sa pratique, son éthique, son auteur tente de fuir , si ce n’est de dénoncer, les excès, les envahissements, les saturations, les comportements intrusifs, les pollutions, ou tout au moins d’éviter de participer à la grande cacophonie du Monde. Il lui faut inviter et préserver des espaces de silence, d’apaisement, de calme, de décélération, pour mieux s’entendre, pour mieux être et vivre dans des espaces sonores entendus comme des communs aussi fragiles que précieux.